Les mille et une facettes de la Méditerranée ont été exposées aux participants, chercheurs, enseignants, étudiants et représentants de médias, venus du Maroc, d’Afrique et d’Europe.
« La Méditerranée comme horizon de pensée ». C’est sous cette thématique générique que la capitale du royaume chérifien, a abrité, ce mardi, 24 mai, le lancement de 47ᵉ session de l’Académie du Royaume du Maroc(ARM). La cérémonie solennelle s’est tenue dans la grande salle de conférence de cette institution créée en octobre 1977, en présence du Secrétaire perpétuel, Abdeljalil Lahjomri, de nombreux enseignants, chercheurs, auteurs, observateurs et journalistes venus du Maroc, d’Afrique et d’Europe. Cette session s’étirera jusqu’au 27 mai, en six séances et plus d’une vingtaine d’angles de réflexions et d’échanges.
Pour la séance d’ouverture, la Présidente de séance, Mme Rahma Bourqia, membre de l’Académie du Royaume du Maroc, a souhaité bienvenue à l’assistance avant de donner la parole au Secrétaire perpétuel, le Pr. Lahjomri : « Après l’Asie et l’Afrique, c’est autour de la Méditerranée d’être abordée comme horizon de pensée », a-t-il indiqué, expliquant que « la méditerranée a pris plusieurs appellations au cours de l’histoire », rappelant qu’ « elle se trouve entre deux continents ». Quant à la question de savoir Pourquoi la Méditerranée ? « Parce qu’elle est liée à plusieurs civilisations au long de l’histoire. C’est aussi la région de plusieurs influences religieuses, l’Islam, le christianisme et la religion orthodoxe. La méditerranée représente plusieurs dimensions et mutations. Le Maroc et l’Andalousie ont constitué des phares du patrimoine culturel de la Méditerranée », a insisté le Pr. Lahjomri, se référant aux travaux de Mohammed Arkoun, islamologue algérien décédé en 2010 et inhumé au Maroc selon ses dernières volontés, le Pr Abdeljalil Lahjomri a indexé « les malentendus que charrie la Méditerranée ».
« A la croisée des chemins »
« Notre espace méditerranéen se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins, du fait des conflits, des migrants qui en font un cimetière. Récupérons notre méditerranée, redonnons-lui son humanité », avait lancé sa Majesté Mohamed VI. Le Pr. Lahjomri a fait sienne cette supplique, appelant à « Repenser la Méditerranée, qui a été la mer la plus ouverte, contrairement à ce qu’avancent certains géographes. Elle est restée un espace d’hospitalité. Aujourd’hui encore, la Méditerranée pose de nombreuses questions, d’où la nécessité de développer une coopération multipartite. La méditerranéité est un espoir pour nous tous ». Le contexte politique actuel est une page vierge sur laquelle on est appelé à écrire une nouvelle page blanche ». Une introduction qui aura duré une vingtaine de minutes avant que M. Mohammed Kettani, membre de l’ARM, ne donne lecture de l’intervention que devait faire le Prince du Royaume de Jordanie. « L’Ouest de l’Asie et le Nord de l’Afrique ont souffert de l’instabilité de la Méditerranée. Région importante pour la mobilité entre l’EuroAsie et l’Afrique », a-t-il noté, poursuivant : « La Méditerranée comme horizon de pensée et de gestion, ajouterai-je, car l’évolution de la situation de la Méditerranée, espace de diversité culturelle et d’unité, permet des ponts entre les peuples. En cela, c’est un espace de rencontres. L’espace Méditerranéen est toujours un espace de voyages pour les pèlerins qui vont la Mecque. Nous devons continuer à débloquer les moyens financiers pour permettre aux gouvernements de fixer leurs populations ». M. Kettani pense que trois défis majeurs se posent à cet espace géographique : « Trouver des solutions face aux conflits des hommes ; trouver des réponses pour faire face au réchauffement climatique et renforcer la coopération entre les peuples ». Il a terminé par des applaudissements nourris. Et il revint à Mr. Habib El Malki, membre de l’ARM, de conclure cette séance inaugurale. Il a d’abord salué l’initiative de l’ARM d’avoir choisi comme sujet de réflexion de sa 47ᵉ session « La Méditerranée comme horizon de pensée », constatant que « La Méditerranée est très présente dans l’identité quotidienne des Marocains ». Puis, il a fait appel à des souvenirs personnels : « Il y a 30 ans, j’ai créé un groupe d’études sur la question de l’espace méditerranéen avec des chercheurs européens, méditerranéens. Un certain nombre de travaux ont permis de constituer un socle sur ce qui nous uni et ce qui nous sépare.
Le cours inaugural de l’ouverture de cette 47ᵉ session est davantage un discours, au sens où l’entendaient Bourdieu, Barthes et autres. Je suis né dans une ville très éloignée du littoral méditerranéen. Et je me demande comment la méditerranée a pu prendre corps dans mon esprit. Puis, je me remémore mai 68, mes lectures et des images créées dans mon esprit », a souligné M. El Malki, martelant : « La méditerranée est devenue dans mon esprit un continent. L’appellation même de cette mer n’est pas impartiale. Mare nostrum chez le Romain, mère arabe chez les Arabes, la Méditerranée est plusieurs mers à la fois comme le disait Fernand Braudel. Toutes ces appellations sont une guerre de cartes géographiques qui se poursuit encore aujourd’hui ». Il a conclu son intervention en proposant de « réfléchir à la mise au point d’un récit marocain sur la grande région méditerranéenne ». Une idée qui semble avoir rencontré un écho favorable dans le public.
« La Méditerranée, berceau des grandes civilisations »
Pour la journée de mercredi, 25 mai, la réflexion portera sur « La Méditerranée : berceau des grandes civilisations » avec un nouveau président de séance, en la personne de M. Driss Dahak, membre de la vénérable institution et de la communication, M. Edhem Eldem, Professeur au département d’histoire de l’Université de Boğaziçi, Istanbul, République de Turquie, sur « La Méditerranée vue de l’est : deux siècles d’une histoire mouvementée ». Il sera alors temps pour M. Lotfi Aïssa, Professeur d’Histoire culturelle à l’Université de Tunis, République tunisienne, d’exposer sur « La Méditerranée dans les histoires générales Maghrébines. Approche comparative » et M. Mohammed Kenbib, Directeur de l’Institut Royal pour la Recherche sur l’Histoire du Maroc, Royaume du Maroc, analysera « La dimension marocaine du réseau portuaire méditerranéen. Approche historique ». L’après-midi de ce même mercredi, la deuxième séance évoquera « la Méditerranée en tant qu’espace philosophique et intellectuel », sous la présidence de Michel Péraldi, Directeur de recherche émérite à l’IRIS, Institut de recherche sur les enjeux sociaux/ CNRS, EHESS, Paris, République française. Nous aurons dans cette partie, l’intervention Mme Rahma Bourqia, Membre de l’Académie du Royaume du Maroc – Royaume du Maroc, au sujet de « La Méditerranée et ses récits », puis M. Rafaâ Ben Achour, Professeur émérite à l’Université de Carthage, République tunisienne, abordera « Les limites de la pensée réformiste en occident musulman » ; M. Mohammed Noureddine Affaya, Professeur de l’enseignement supérieur à l’Université Mohammed V Rabat, Royaume du Maroc, parlera de « La Méditerranée et l’imaginaire en acte » et M. Sobhi Bouderbala, Professeur de l’enseignement supérieur à l’Université de Tunis, République tunisienne, « L’acculturation en Méditerranée d’après les premiers documents de l’Islam (VIIᵉ-IXᵉ siècle) ».
Par Jean-Célestin Edjangué à Rabat
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