Point de vue d’Abraham WASSIAMA

Dans un contexte international mouvant où la mondialisation fait rage et où les velléités conquérantes et expansionnistes rejaillissent après une pandémie qui a montré les limites de notre société aux figures imposées, les Congolais, avides de liberté, ne peuvent subir indéfiniment un régime oppresseur. Vont-ils, un jour, relever la tête, se redresser et affronter leur Chef, afin de renverser la table et briser les chaines qui les étreignent ?

Un peuple fier est celui qui se bat, quelle que soit la dureté des temps, autour de ses valeurs dont le fondement repose sur la quête de liberté. Est-ce le cas pour les Congolais ?

Par-delà des humiliations, des larmes et du sang, les Congolais ne perçoivent aucune perspective susceptible de croire aux lendemains qui chantent. Leur accommodement contraint, et parfois naïf, est aux antipodes des luttes de libération menées par leurs aïeuls. Dépérir sous une dictature dont on se rend complice par fatalisme béat, bouscule les consciences tant l’on tutoie le summum de l’asservissement. Historiquement, le règne de Sassou se situe dans le prolongement de deux tristes époques africaines. Celle de l’esclavagisme et celle du colonialisme. Si le plus vaste mouvement forcé de personnes innocentes de l’histoire a duré plus de 400 ans, le règne de Sassou tend désormais à équivaloir au drame que fut le colonialisme tant dans sa durée que dans ses conséquences. Combien de vies aura-t-il emportées ? Il sera impossible de le savoir avec exactitude.

Tandis que les fâcheuses visées des acteurs coloniaux et esclavagistes reposaient, pour l’essentiel, sur des motivations économiques, celles des tenants du régime Sassou sont, on ne peut plus, irrationnelles et subjectives. Ces trois modèles de naufrage systémiques trouvent leur point de convergence à la jonction des prédations des richesses du pays au détriment des populations.

Dérive au gré des imposteurs

Il n’est pas abusif de considérer le régime de Brazzaville comme oppresseur, sans but ni objectif réel pour le pays. Cette loque politique et son prétendu pouvoir, après s’être fait l’incarnation de la voyoucratie et de la médiocrité, a achevé l’effondrement de l’administration du pays et de ses poutres millénaires. Le Congo-Brazzaville dérive au gré des imposteurs qui se le sont accaparés.

Ils se sont appropriés tout ce qui appartenait à l’État. Ils ne cessent de s’attribuer les titres de propriété de tout ! La moindre boutique, la moindre entreprise, la moindre chanson, la moindre pompe funèbre, la moindre parcelle, la moindre école, le moindre salon de coiffure, le moindre canal de télévision, le moindre baril de pétrole, le moindre bus, le moindre taxi ne peuvent exister sans leur parrainage. La population quant à elle, réduite à la mendicité, ne sait plus ce que c’est qu’un salaire. On l’habitue de plus en plus à recevoir l’aumône afin de mieux l’asservir. Pas un pas sans le clan.

Contrairement à l’ex-puissance coloniale dont on espérait repartir chez elle un jour, le régime dictatorial de Brazzaville inflige aux congolais un tarif local illimité. Il s’autorise des libertés ahurissantes sans bornes. Son arrogance d’invincibilité le pousse aujourd’hui à des considérations dynastiques très éloignées des logiques démocratiques.

La dynastie familiale est une litanie moyenâgeuse qu’affectionnent les tyrans les plus répugnants. Trouver les bonnes clés permettant d’enrayer la déraison au sommet du pouvoir afin de libérer l’Afrique de tous ses imposteurs est une nécessité absolue qui oblige les démocrates, de moins en moins nombreux, hélas.

Monarchies déguisées en démocratie

En Ouganda, le fils Museveni a récemment quitté l’armée pour devenir le chef suprême du pays, prélude de la succession au trône après son père. Ali Bongo au Gabon, Faure Gnassingbé au Togo, Joseph Kabila en RDC et Mahamat Idriss Déby au Tchad sont déjà inscrits au triste marquoir. Théodorin Obiang en Guinée Equatoriale, Franck Biya au Cameroun, Noureddine Bongo encore au Gabon sont prépositionnés afin de reprendre le flambeau de la « propriété familiale ».

Ivan Kagamé au Rwanda et Denis Christel Sassou-Nguesso au Congo-Brazzaville, pour lesquels d’ailleurs leurs pères respectifs font des contorsions sur l’amitié Congo-Rwanda, mettent les balises sur la voie de leur succession au trône. L’obsession de la conservation du pouvoir au sein du clan, notamment de la descendance de Sassou est une opportunité pour les prédateurs du Congo-Brazzaville qui ont toujours ciblé le bois, le pétrole, l’or, l’étain … et les terres.

Pour saisir les tenants psychologiques de ce désir obsessionnel de transmission dynastique du pouvoir de Sassou et de ses homologues subsahariens, il est essentiel de se tourner vers le spectre de la déshérence de la famille de Dos Santos en Angola, de Mobutu en RDC et celle de Bokassa, empereur de son empire centrafricain, d’une part ; et à la crainte des règlements de comptes politiques et judiciaires.

La mise en scène du fils de Sassou, Kiki, qui monte sur tous les chevaux sans pour l’instant s’asseoir sur le fauteuil de son père, est une manœuvre qui vise à l’installer subrepticement sur le trône. Ce penchant pour l’alternance familiale est une réponse trouvée par le chef suprême afin de préserver l’intégralité des intérêts du clan après sa disparition.

Soudain, repoussé à l’ouest de la RDC où il opère des tentatives de l’élargissement de son territoire, Kagamé a surgi avec fracas à l’Est, notamment au Congo-Brazzaville où il s’est octroyé, en enjambant deux fuseaux horaires, une portion des terres de ce pays. La difficile question d’occupation des terres, de leur peuplement ou de leur répartition ainsi que celle de l’exploitation des ressources sont à la base de la quasi-totalité des conflits des êtres, humains ou animaux, sur terre.

L’opacité qui entoure les accords et échanges entre ces deux régimes autoritaires nourrit les soupçons d’un partenariat biaisé, qui laisse présager des difficiles lendemains au Congo-Brazzaville, point d’ancrage pour une expansion de Kagamé sur le plan continental.

Vendre son pays peut se caractériser par la commercialisation sans éthique, voire à pertes, de ses richesses, ou par le surendettement opaque, via des rétrocommissions, ou en gageant de manière inconsidérée les ressources, bref, par l’anéantissement ses forces de progrès au bénéfice des intérêts étrangers. En cela, on peut reconnaitre aisément le pouvoir devenu fossile de Brazzaville.

*Abraham WASSIAMA
Conseiller du Président Marcel GUITOUKOULOU Le Congrès du Peuple

NB : Les opinions émises sur cette page n’engagent que leurs auteurs.

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