Cette jeune béninoise, lauréate du Concours des Trophées, veut concrétiser son projet de partager la culture du safran entre la France et son pays d’origine. Elle en explique la genèse et les objectifs. Rencontre…
« Je me nomme Gloria Ismène Houénoukpo KPEDJO à l’état civil et Amazone du micro et de la plume en pseudo. Journaliste, médiatrice culturelle et agri-entrepreneur, je suis une jeune femme béninoise d’une trentaine d’années. Après mon baccalauréat, série littéraire, je suis entrée à l’école de journalisme en 2013 au Bénin, j’ai soutenu en 2016 une licence à l’université d’Abomey-Calavi/UAC », confie Gloria Ismène Houénoukpo KPEDJO, poursuivant :« Ensuite, j’ai bénéficié d’une bourse, octroyée par une association française de journalistes « Reporters Solidaires » pour effectuer un master 2 en techniques des métiers de l’information à l’université Nazi Boni au Burkina Faso. Major de promotion dans ce master, j’ai obtenu une bourse de mobilité Erasmus+ qui m’a permis de faire un master 2 en nouvelles pratiques journalistiques dès 2019 à l’université Lumière Lyon 2 ».
Passionnée de culture et d’agriculture
Cette béninoise ne se doute pas alors de ce que sa vie est véritablement en train de changer.
« L’année suivante, j’ai fait un master sur fonds propre en médiation culturelle, car je suis intéressée par la culture. Mon ambition professionnelle est d’enseigner, partager mes expériences avec les générations actuelles et futures, m’investir aussi dans l’agriculture qui me permettra de créer des emplois et surtout de répondre à certains besoins de la société ». Et rien d’étonnant alors que c’est le travail de la terre qui lui ouvre l’esprit pour se projeter dans l’avenir plus ou moins immédiat. « Mon projet consiste à exporter le savoir-faire de la production de l’or rouge (le safran) de la région Auvergne-Rhône-Alpes au Bénin, faire la distribution sur le plan national et international. Vous savez, dans la vie, chaque personne a des centres d’intérêts, la cuisine et l’agriculture font partie intégrante des miens. J’aime la bonne bouffe, on ne peut donc pas dissocier cuisine et agriculture », affirme encore gloria Ismène, se souvenant même qu’elle y est tombée relativement tôt. « Quand j’étais adolescente, rappelle-t-elle, j’ai travaillé dans des champs de maïs, de haricot, d’arachide avec mon feu grand-père et mon père. Ainsi, j’ai pris davantage goût à la terre, car elle ne ment jamais, elle nous rend toujours ce qu’on lui donne. Je me suis promis d’y investir quand je serai adulte. Observant tous les problèmes domaniaux, les questions d’héritages qui sont bien difficiles dans mon pays, j’ai décidé d’avoir personnellement des terres pour atteindre mon objectif ». Et chez elle, la parole n’est jamais bien très loin des actes. « Entre 2020 et 2021, j’ai payé un domaine sans forcément savoir ce que j’allais cultiver ; certes je me dis toujours « Ismène, tu es unique en ton genre et tu fais de toi ce que tu es, alors tu dois faire des choses extraordinaires ».
La découverte de l’or rouge
Faisant son petit bonhomme de chemin, Gloria Ismène sait qu’un bon parcours passe nécessairement par une intégration exemplaire : « Dans mon processus d’intégration en France, j’ai candidaté au programme Jeunes Ambassadeurs, un creuset qui permet aux étudiants et jeunes diplômés internationaux de mieux découvrir la culture française avec l’accompagnement d’un parrain ou une marraine et à travers plusieurs activités dont le concours des Trophées.
Une fois ma candidature retenue, j’ai rencontré le 16 novembre 2021 ma marraine Anne-Marie Letessier, professeure d’anglais retraitée du Lycée Chevreul Lestonnac et coordinatrice des projets à l’international du lycée », souligne-t-elle, expliquant : « Après cette prise de contact, nous avons convenu de nous revoir le plus tôt possible parce que j’ai décidé de participer au concours des trophées. À ce rendez-vous, nous avons parlé de nos vies, nos familles, de ce que nous aimions, et j’ai évoqué ma passion pour l’agriculture, la cuisine et mon projet Jeunes Ambassadeurs qui reliera la France et mon cher Bénin. Dans nos échanges sur les saveurs culinaires, ma marraine m’a demandé si je connais l’or rouge, j’ai répondu non. Elle m’a demandé de faire recours à internet. Je me suis rendu compte que son nom propre est le safran. C’est une épice utilisée dans la cuisine, la pâtisserie, la teinture et a aussi des vertus médicinales ».
Mieux faire connaître le Safran au Bénin
Depuis, Gloria Ismène Houénoukpo KPEDJO, rêve non seulement de cultiver cette épice aux couleurs majestueuses, mais également de mieux la faire connaître au Bénin et même dans la sous-région ouest-africaine. « L’utilisation d’épices est indissociable de la cuisine, mais le safran, dont les qualités gustatives sont très prisées, est peu connu au Bénin. Très enthousiasmée pour la découverte de cette épice, j’ai demandé à ma marraine s’il est possible de trouver une ou des safranières à Lyon afin que je touche du doigt la réalité. Qu’elle soit rurale ou urbaine, la culture du safran est effective dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. De la safranière des Monts du Lyonnais, à celle des toits du centre commercial de la Part Dieu, la charte est la même : le respect du cycle de la plante, une agriculture biologique, des techniques artisanales et un dévouement à l’or rouge », confie toujours la béninoise, mentionnant : « Après avoir évalué les possibilités d’adaptation des bulbes de crocus au sol du Bénin, ma vision s’est vite élargie au-delà de la culture du safran et de l’échange de savoirs et savoirs faire entre les deux pays. J’ai envisagé l’exploitation de mes terres, la formation professionnelle des femmes, les nouveaux débouchés économiques, l’intérêt d’investisseurs privés, le partenariat avec des agronomes, cuisiniers et herboristes ». Une passion pour l’or rouge qui demande de lui consacrer beaucoup de temps et d’énergie, pour la connaître de fond en comble.
En quête de financements
« J’ai poursuivi mes recherches et je suis tombée sur une vidéo, celle d’un jeune agronome béninois qui expliquait la faisabilité de la production du safran au Bénin. Toute suite, j’ai essayé de prendre contact avec lui pour discuter de mon projet et pourquoi pas une collaboration. Hélas, j’ai connu une déception et je vous épargne des détails. Dès lors, je me suis dit, quel que soit le prix à payer, je vais concrétiser ce projet. C’est ainsi que le projet « partage de l’or rouge entre la France et le Bénin » a vu le jour ». La preuve que Gloria Ismène a de la ténacité à revendre, elle n’a pas dévié de son objectif initial. Bien au contraire ! « Hormis les terres que je possède, et les partenariats humains déjà établis, je suis en formation au sein de l’incubateur du centre d’entrepreneuriat Lyon-Saint-Étienne pour mieux habiter mon projet, acquérir les compétences nécessaires et pouvoir réfléchir sur les différents enjeux. Le plus dur à l’heure actuelle, c’est le financement pour effectuer l’installation de la ferme », confesse-t-elle, précisant : « Pour y arriver, j’ai lancé une collecte de fonds, cette vidéo qui suit https://urlz.fr/ifbW vous donne plus de précisions. Et pour m’aider, vous pouvez contribuer ici https://www.leetchi.com/c/partage-de-lor-rouge-france-benin et/ou partager à vos contacts ! ». Et de conclure : « Je reste disponible, ouverte pour vos apports, différents types de collaborations et partenariats dans le cadre de ce projet. Vous avez mes coordonnées ci-dessus dans le lien de la page de contribution ». Cette béninoise, enthousiaste, courageuse et imaginative, n’attend plus que votre coup de cœur, pour réaliser un projet qui est aussi le rêve de sa vie.
Par Jean-Célestin Edjangué