Président du Mouvement de février 2008, une association, créée dans le contexte des troubles politiques et socio-économiques qui ont embrasé le triangle national, il y a 15 ans, il revient sur la genèse de la création de cette structure et évoque la cérémonie d’hommage prévue en mars prochain à Bruxelles.

Comment est né le Mouvement de février 2008 et dans quel but ?

L’association est née en 2009, soit un an après ces évènements dramatiques de février 2008. Il s’agissait déjà à l’époque, et c’est toujours vrai aujourd’hui, de tout faire pour maintenir vivace le souvenir de ceux qui sont morts pour avoir exprimé leur opinion, pour avoir manifesté publiquement leurs sentiments profonds. C’est quand même incompréhensible que dans un pays qui se dit démocratique, les citoyens ne puissent pas dire librement ce qu’ils pensent. On retient que malgré le sacrifice des jeunes, sortis naïvement pour manifester contre la vie chère et contre le projet de modification de la constitution qui faisait sauter le verrou de la limitation du mandat présidentiel, ils ont été massacrés en février 2008. Pour nous, ces victimes sont des martyrs de la liberté. On constate aussi que 15 ans après, justice n’a toujours pas été rendue aux familles de victimes. Nous continuons à demander que réparation soit faite. Il n’est pas normal que l’État du Cameroun ne manifeste aucune bonne volonté pour aider les familles à faire le deuil de leurs membres qui ont été arrachés à la vie, souvent à la fleur de l’âge. »

Vous organisez chaque année, depuis 2009, des manifestations pour se souvenir de cette date et des victimes. En quoi peut-on dire que cela a changé quelque chose ?

« Il n’y a malheureusement rien de nouveau à l’horizon. Pour dire vrai, les choses se sont même dégradées. 15 ans après, nous sommes toujours dans un contexte de hausse des prix de produits de première nécessité, toujours dans la répression des manifestations publiques et les intimidations de tous genres. Les commerçants qui ont perdu leurs biens n’ont toujours rien perçu en guise de dédommagement, il n’y a eu aucun accompagnement dans ce sens, comme si ça allait de soi. Comment peuvent-ils se relancer ? Ce n’est même pas encourageant pour l’économie du pays. Bref, 15 ans après, il n’y a eu aucune amélioration. On peut même dire que la situation s’est dégradée, même les journalistes qui tentent d’informer sur les dysfonctionnements de la société, sur les détournements de deniers publics sont enlevés, torturés et assassinés ».

Quel est le programme des manifestations commémoratives, cette année, à Bruxelles.

Programme des manifestations commémoratives prévoit entre autres la traditionnelle cérémonie de dépôt de la gerbe, dans la deuxième semaine de mars 2023 et une grande réflexion dans le cadre d’une Conférence sur « Les émeutes de février 2008, quels enseignements pour les libertés au Cameroun, 15 ans après ? ». Il faut par ailleurs repenser le contrat social, avec un vrai dialogue inclusif qui n’a rien à voir avec le simulacre de dialogue de 2018 qui n’a rien donné. Et comme l’État a montré ses limites en la matière, c’est la société civile camerounaise, y compris la diaspora, les prêtres, les syndicats, les associations d’étudiants, les organisations non gouvernementales, les partenaires du Cameroun, qui doivent prendre l’initiative.

Recueilli au téléphone par J.-C. Edjangué

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