Administrateur de la Chaire des littératures et des arts africains de l’Académie du Royaume du Maroc, il a bien voulu nous partager son analyse sur la rencontre internationale qui a réuni des universitaires, chercheurs et autres invités venus du Maroc, d’Afrique, d’Europe et d’Amérique, à rabat, les 6 et 7 mars 2024.
« Le Colloque sur les origines et les grandes dates de l’histoire des littératures africaines et diasporiques, s’est achevé le 7 mars 2024, à 20 heures. Quelques chiffres : une vingtaine de participants, 20 minutes d’intervention réservées à chaque universitaire. Deux journées de réflexion et d’échanges, participation et au bout de cette mécanique, nous avons tenu à célébrer, à la fois, les littératures orales, les contes et légendes, les joutes oratoires, les devinettes, les chants, les sons, danses et poésies. L’autre grande branche, ce sont les littératures écrites qui ont aussi une très longue histoire en Afrique. Et ce sont ces temporalités qui peuvent poser quelques soucis de clarification ». Le Pr. Eugène Ebodé, Administrateur de la Chaire des littératures et des arts africains de l’Académie du Royaume du Maroc, à Rabat, ne manque pas de mots, pour parler du colloque qui tenu dans cette institution, début mars dernier.
L’Afrique, continent aux Trois mille langues
« Ces temporalités sont également liées à la grande diversité des langues africaines. Songeons que l’Afrique compte autour de trois mille langues. Et parmi ces langues, il y en a qui ont donné aux littératures de grands textes. Il s’agit de les recenser. L’opération n’est pas facile. Tout le monde connaît le hiéroglyphe, mais peu de gens savent le guèze est une langue de grande culture, que le tifinagh, en Afrique du Nord, au Maroc et en Algérie, pèsent d’un poids certain, et que l’ajami est une transformation de la langue arabe, et qui permet aussi de porter les pensées, les récits venus du monde haoussa, du monde peul et d’autres populations africaines », indique Eugène Ebodé, avant de noter, presque désolé : « Peu de gens savent aussi que dans les langues comme le pidgin, une littérature s’élabore, et que l’histoire du récit est la capacité que peuvent ressentir les littératures, les écrivains, mais aussi les lecteurs, à pouvoir élargir leurs imaginaires, leur monde, c’est une réalité augmentée qui passe par la littérature. Et nous en avons fait le constat. Elle est portée par des figures diasporiques », insiste-t-il, rappelant au sujet de ces figures : « Et nous les avons visitées notamment grâce aux doubles apports de Dieudonné Gnammankou, qui nous a rappelés les origines africaines de Pouchkine, mais aussi par Karen Ferreira-Meyers, qui, en nous racontant la littérature blanche d’Afrique du Sud, a évoqué ces migrants dont on parle peu, et ont occupé un espace littéraire, un espace imaginaire importé, et à partir duquel, ceux qui sont venus d’Europe du Nord, d’Europe centrale ou encore d’Europe du Sud, ont trouvé en Afrique du Sud, un terrain favorable, pas toujours pour l’harmonie des populations, mais pour la domination qui a eu pour effet d’écraser ceux qui étaient déjà sur les terres de leurs ancêtres et qui apparaissaient comme étant des intrus ». Et de faire cette piqûre de rappel : « La littérature, c’est pour célébrer les harmonies, en gros, pour célébrer les cosmogonies, les ontologies. L’idée du récit qui a traversé le colloque, nous a permis d’arriver à des conclusions. Pour conclusions, nous avons retenu le fait que si les littératures constituent un puzzle, le Pr. François Xavier Fauvel, a émis l’idée qu’une chaire des Civilisations africaine puisse être créée à l’Académie du royaume du Maroc. Et le secrétaire perpétuel, Abdeljalil Lahjomri, a tout de suite accepté cette idée ». Et le Pr. Ebodé de clôturer, enthousiaste : « C’était une grande surprise, c’était un grand moment. Nous remercions évidemment l’Académie du Royaume du Maroc pour son inventivité ».
Par J.-C. Edjangué