Réalisateurs d’origine camerounaise, promoteur de la maison de production Undercover Brothers Entertainment, organisatrice de la Semaine du cinéma africain, dont la 5ème édition aura lieu l’été 2025. Il explique sa vision et les objectifs de l’événement qui se prépare.

M. Hervé Moukoko, merci pour votre disponibilité. Vous êtes réalisateur, promoteur de la Semaine du cinéma africain dont la 5ème édition aura lieu en début d’année 2025. Quels sont les enjeux et objectifs de cette manifestation ?


Merci Monsieur Edjanguè pour votre intérêt à la promotion du 7ème art africain . La Semaine du Cinéma est une plateforme où les créateurs, producteurs et distributeurs peuvent projeter, proposer, distribuer et où vendre leurs contenus sur le continent et à l’échiquier international. C’est également une académie dans laquelle les aspirants au métier du cinéma et de la télévision ont droit à des formations distillées par des professionnels du métier, des bourses d’études des écoles d’audiovisuelle du continent. Donc les enjeux sont énormes, et nous voulons former de plus en plus de monde et distribuer de plus en plus des films dans les salles les festivals, télévision et streaming. Les objectifs de cette manifestation sont de devenir une véritable plaque tournante sur le Continent. Car pour construire une industrie solide, il nous faut des outils solides. Mais nous ne pourrons atteindre ces objectifs si les médias, les institutions, les cinéphiles, les professionnels, les autorités ne mettent pas la main à la pâte. C’est parce que nous avançons encore en rang dispersé que notre cinéma est à la traine. Ce festival n’est pas un festival de Undercover Brothers Entertainment, c’est le festival de tout un continent.


On imagine les difficultés qui peuvent se dresser sur le chemin de l’organisation de cet événement. Vous pouvez nous en dire quelques mots dans un continent africain qui donne l’impression de tourner de plus en plus le dos à la promotion du 7ème art dans des salles obscures ?


Vous le savez autant que moi, l’argent reste le véritable problème. Mais comment en vouloir aux sponsors qui à l’époque ont fait confiance à certains promoteurs qui sont rentrés dans la nature avec des fonds qui leur ont été alloués. Malheureusement, ils nous ont savonné la planche. Certaines personnes sont dans le cinéma, pas parce qu’elles aiment ce métier mais pour profiter des avantages du cinéma. Et ça se ressent dans les productions, dans la manière de communiquer, du temps qu’on y consacre. En même temps, quand aujourd’hui vous avez des influençeurs.euses. (en lieu et place des acteurs.ices professionnels) qui sont incapables de donner la moindre émotion à l’écran, ça montre à quel point notre industrie est malade, bien sûr que les distributeurs et autres vont aller voir ailleurs, là où ça bosse véritablement, ça prend au sérieux ce métier. Donc oui ça donne l’impression que le Continent a tourné le dos à la promotion du 7e art, parce que nous avons beaucoup d’imposteurs qu’on présente comme figures de proue de notre cinéma. Donc tous les jours, nous nous battons pour prouver aux partenaires, sponsors aux autorités que nous sommes dignes de confiance. Nous sommes là pour faire avancer les choses, faire en sorte que nous soyons totalement indépendants, avoir un réel impact sur notre génération et les prochaines, mais pour cela il faut léguer un outil très solide qui va durer dans le temps. Et pour que ça se concrétise, il nous faut de véritables Fonds. Nous n’avons même pas encore exploité 5% du potentiel de ce festival. Mais ce jour viendra, et croyez-moi notre industrie deviendra l’objet de convoitise.
Les frères Lumière nous ont légué le Cinéma, les Frères Warner nous ont légué le son au cinéma. Et nous qu’allons-nous léguer à nos enfants et petits-enfants ?

Nous l’avons dit, la 5ème édition se prépare pour janvier 2025. Un bilan des 4 précédentes ?


Un bilan plutôt satisfaisant. Mais encore pas mal de choses à améliorer pour faire de la Semaine du Cinéma, un véritable outil de promotion du 7ème art africain.
Nous avons été accueillies dans 3 magnifiques capitales (Yaoundé, Niamey et Brazza) et l’engouement était toujours au rendez-vous, la demande de plus en plus forte. Nous nous sommes rendus compte que les gens ont soif d’apprendre, sont friands de bonnes productions et veulent surtout progresser, tout ce qu’ils demandent c’est un cadre adéquat pour exprimer leur talent. Hollywood, Nollywood, n’ont pas de belles productions, parce qu’ils sont plus intelligents que nous. Non ! Ils ont de belles productions parce qu’ils sont dans un cadre où ils peuvent bien s’exprimer. Nous avons encore beaucoup d’histoires inexploitées chez nous qui plus est de très belles histoires. Elles n’attendent que nos talentueux créateurs pour les porter à l’écran. Qu’il y ait une version des Tyler Perry Studios en Afrique Francophone et vous verrez de quoi je parle.

Recueilli par J.-C. Edjangué

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