Administrateur du Fonds de développement des filières Cacao et Café(Fodecc). Nous l’avons rencontré à la Porte de Versailles, à Paris, à la 60ᵉ édition du Salon international de l’agriculture. Dans cet entretien exclusif, il parle des missions du Fonds de développement des filières cacao et café, de la révolution que cette institution a entamée sur le chemin de sa modernisation, avec l’ambition de concilier production durable et revenu décent des producteurs.

Qu’est-ce que le Fodecc ? Quelles sont ses missions et attributions ?

Le Fodecc l’abréviation du Fonds de développement des filières cacao et café du Cameroun. C’est un établissement public, destiné au financement du développement des filières cacao et café au Cameroun. Avec quatre objectifs : le soutien à la recherche dans les deux spéculations ; le soutien au développement des projets et programmes liés à l’amélioration de la production ; le soutien au développement des projets et programmes liés à la transformation et le soutien lié au développement des projets et programmes destinés à la consommation. Le Fodecc accompagne donc l’ensemble des administrations dans les départements de recherche jusqu’à la transformation en passant par la production et la commercialisation.

Le cacao et le café du Cameroun sont réputés pour leur excellence. Il se trouve qu’un pays comme la Côte d’Ivoire, premier producteur mondial du cacao, a réussi à installer des unités de production et de transformation pour avoir du chocolat. Pourquoi pas le Cameroun ? Qu’est-ce qui pose un problème ?

Très bien votre question. La Côte d’Ivoire, pour ne parler que d’elle, est effectivement le leader mondial en termes de production de fèves de cacao. Avec 2 millions de tonnes, parfois un peu moins, pour être leader incontesté au niveau mondial. Il a fallu à la Côte d’Ivoire, malheureusement, de très nombreuses années, pour envisager commencer à transformer localement ses produits. Mais là s’arrête la critique. Ce que je puis dire, s’agissant du Cameroun, c’est que la stratégie du Cameroun est bâtie sur la conservation de la valeur ajoutée en territoire camerounais. Si l’accent continue d’être mis sur l’exportation des fèves, l’objectif majeur au Cameroun, est d’installer progressivement des unités de transformation. Aujourd’hui, il en existe à peu près quatre d’installer, pour un tonnage avoisinant les 130 mille tonnes, soit le tiers de la production nationale. Il y a un certain nombre d’autres acteurs, qui frappent à la porte et qui souhaiteraient installer localement des unités de transformation. Ceci n’est donc pas seulement un effet de mode, c’est une stratégie volontariste, parce qu’en transformant la fève, pour l’industriel, cela représente un gros avantage localement.  Les capacités installées localement permettent d’accéder plus facilement à la fève et très vite de l’utiliser en vue de son exportation que de garantir que cette fève collectée, emmagasinée, conditionnée avant d’être exportée. Le coût est devenu de plus en plus important pour les industriels. Le dispositif le plus approprié aujourd’hui, c’est donc d’installer des unités de première et de deuxième transformation là où se trouvent les plantations.

Je voudrais maintenant que nous parlions de labellisation. Le chocolat du Cameroun, nous l’avons déjà dit, est reconnu pour son excellence. Où en est-on de sa labellisation ?

Le processus de labellisation et de certification de la qualité gustative du cacao camerounais est incontestable. En termes de labellisation, la couleur rouge brique du cacao a été déposée à l’OAPI, l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle, il y a peu de temps.

C’est récent ?

Oui, malheureusement. La deuxième chose, c’est qu’outre cette appellation contrôlée, cette couleur rouge brique, qui est essentielle pour conforter la couleur du chocolat, se trouve naturellement rendue par une bonne partie du terroir de production du cacao camerounais. Cet avantage, comparé à d’autre pays, demande simplement à être valorisé et cette valorisation se trouve heureusement mise en route maintenant. Et, je pense que très bientôt, vous aurez effectivement une reconnaissance planétaire de l’origine Cameroun. En tout cas, les autorités travaillent fondamentalement à ce que, ayant perdu le combat de la quantité, le Cameroun bénéficie, de par ses avantages naturels, de l’aspect qualité. Et c’est sur ce processus que nous mettons aujourd’hui en œuvre, que nous misons fondamentalement. Je vous informe que le Cameroun a été reconnu mondialement comme pays éligible, mais désormais admis dans le club très sélect des « fine and flavored cocoa », c’est-à-dire comme pays produisant du cacao fin et aromatisé. Donc bientôt, sur le marché, une bonne partie des fèves originaires du Cameroun sera vendue sous ce label.

L’actualité du Fodecc dans les semaines et mois à venir ?

C’est une révolution qui est en cours au niveau du Fodecc. Permettez-moi de le dire avec beaucoup de plaisir. Nous sommes en train de transformer le quotidien des producteurs. En supprimant les intermédiaires, nous avons permis au producteur d’accéder directement au financement de son activité. Ceci garanti aujourd’hui à la production le drainage quasi intégral de toutes les ressources que l’état destine pour encourager le développement des filières cacao et café. Ce mécanisme a été mis en place par le fonds de développement des filières cacao et café, sous l’appellation guichet producteurs. Derrière ce guichet, qui vise à digitaliser l’ensemble des process, à géo référencer l’ensemble des parcelles et à identifier l’ensemble des producteurs, nous avons greffé en termes de développement, deux autres guichets : un guichet pour les infrastructures collectives et mis en route en 2024, un troisième guichet qui prépare à la transition agroécologique. En réalité, grâce au Fodecc et à grâce à ses innovations, le Cameroun s’inscrit progressivement dans le dispositif planétaire des pays qui font de la production durable. Protégeant l’environnement, protégeant la forêt, mais permettant, en même temps, au producteur de gagner décemment sa vie. Voilà le leitmotiv du Fonds de développement des filières cacao et café.

Mené par Jean-Célestin Edjangué à Paris

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