Terre d’érudits, de patrimoine et d’histoire, cette commune captivante et surprenante, est aussi une destination touristique incomparable.
Dalaba. Son nom sonne comme une invite à la découverte, à l’aventure, sur les hauteurs du massif montagneux du Fouta Djallon. Cette ville de Guinée, située à 360 kilomètres de Conakry, la capitale, est le chef-lieu de préfecture du même nom, dans la région administrative de Mamou. C’est cette localité, qui niche sur les hauts-plateaux du Fouta Djallon, à une altitude de 1 276 m., qui est la ville invitée d’honneur de la 14ᵉ édition des 72 heures du livre de Conakry Son paysage est celui de collines verdoyantes adossées au mont Tinka. Le plateau de Dalaba se termine par un escarpement rocheux qui domine la haute plaine de la Téné. Ce qui n’empêche guère, de temps en temps, d’apercevoir une vache, une chèvre où un bouc, tête baissée, en train de fouiner pour trouver un peu d’herbe fraîche à brouter ou, plus surprenant, de vieilles étoffes, tissus, voire du plastic à manger… La protection de l’environnement n’a jamais autant justifié sa nécessité, même si en comparaison avec Conakry, la capitale, Dalaba n’a pas vraiment de quoi rougir, elle qui se targue notamment, de par son climat et sa situation montagneuse, d’avoir le surnom ô combien flatteur de Venise africaine, fabriqué au cours de l’histoire, par la beauté insaisissable de la région qu’épouse quasi-parfaitement l’imprévisible caractère des populations locales.
Un cas atypique dans l’histoire de l’indépendance de la Guinée
Cette région située au Fouta Djallon occupe une place à part dans la mémoire du « non » car elle fut sous Sékou Touré et plus globalement encore aujourd’hui, considérée comme la moins acquise au processus précoce d’émancipation de la Guinée. « De fait, alors que le « non » l’emporte à plus de 90 % en moyenne à l’échelle nationale, certaines circonscriptions du Fouta enregistrent des scores moindres, comme celle de Dalaba où le « non » représente 78 % des voix. La région de Dalaba occupe, en effet, une place singulière au Fouta Djallon en raison des liens subtils établis entre le PDG et la chefferie locale. Partout en Guinée, la stratégie du PDG avait été de s’implanter en remettant en cause la chefferie dite coutumière pour finalement l’abolir officiellement le 31 décembre 1957. Or, à Dalaba, le chef de canton Thierno Ibrahima Bah et son frère Bademba Bah adhérent en 1957 au RDA, en vue des élections à l’Assemblée territoriale », rapporte un travail de recherche paru dans l’ouvrage Les indépendances en Afrique, 1957/1960-2010, sous la direction d’Odile Goerg, Jean-Luc Martineau, Didier.
Un paysage à couper le souffle
Quand on rentre dans Dalaba, en provenance de Conakry, on sait qu’on a changé d’environnement, de milieu géographique et même d’état d’esprit. Les paysages, même de nuit, semblent laisser transparaître ce je ne sais quoi d’indescriptible, qui dépasse l’entendement. À Dalaba, le temps semble être suspendu pour un ou plusieurs jours, semaines, mois… On s’arrête de courir, de gambader, de stresser. On marche, on prend le temps d’observer, d’apprécier chaque instant, de contempler la majesté de l’espace qui invite au calme de l’esprit et l’apaisement des cœurs.
Dès le matin, le lever de soleil, souvent autour 6 heures 15, en ce mois d’avril, annonce déjà une journée remplie de promesses. La promesse d’une journée inhabituelle, rythmée par de surprises dont on ignore la nature. La promesse d’une rencontre improbable, entre les hommes, la nature et les bêtes. La promesse d’un émerveillement lors de la visite de la Villa Jeannine, avec sa case à palabres et son cadre bucolique, son environnement saisissant d’ »une beauté rare, avec ses jardins fruitiers, son architecture recherchée, et les artisans qui vendre des produits et biens locaux made in Dalaba, comme ces sets de tables faits main avec de la vannerie dont la finesse et les couleurs chatoyantes ne laissent aucun doute sur le savoir-faire des vanniers de cette commune ; ou encore l’outil boisé qui servait de fer à repasser dans le temps : « Il fallait juste appliquer le bâton sur le vêtement ou le tissu que l’on voulait repasser, en tapant à plusieurs reprises de manière régulière, pour défroisser le vêtement que l’on voulait porter.
Restaurer la Maison de Miriam Makeba
Mais la surprise de la journée peut aussi s’avérer être un choc. Parce qu’inattendu, déstabilisant, inimaginable, même lorsqu’on a eu la nouvelle plusieurs jours, semaines, mois ou années, auparavant, le choc est d’autant plus dur à encaisser. Ce dernier jeudi du mois d’avril 2022, à la faveur des 72 heures du livre de Conakry, une visite à Dalaba, ville invitée d’honneur de cette édition, de la Maison de Miriam Makeba, la chanteuse à succès sudafricaine, militante politique engagée dans la lutte contre la ségrégation dans son pays, arrachée à la vie en novembre 2008, en Italie. L’artiste a vécu plusieurs années durant, dans cette demeure, pendant qu’elle se consacrait à la cause des enfants de Guinée. Son action en direction des femmes était tellement importante, notamment pour celles qui accouchaient, que nombre des bébés filles de l’époque portaient son nom.
Pour que sa mémoire ne tombe à jamais dans l’oubli, le Comité d’organisation des 72 heures du livre et l’ensemble des participants à la 14ᵉ édition ont décidé de mettre sur pied un Comité international de réflexion pour la restauration de cette demeure où Miriam Makeba, même décédée, continue de respirer à travers chacun des objets qui résistent à l’épreuve du temps, du côté de Dalaba. C’est vrai que « Sauvegarde du patrimoine et paix sociale », c’était le thème de l’évènement culturel le plus important de la Guinée qui a refermé sa 14ᵉ page dans cette commune atypique, le 29 avril 2022.
Par Jean-Célestin Edjangué à Dalaba via Conakry
Monsieur Edjangué à un talent phénoménal pour nous présenter en détails et nous faire envie de visiter cette région dont il est visiblement amoureux. Heureux sont ceux qui pourront profiter de son savoir (un livre ? Un guide ?) Et il est souhaitable que les structures d’accueil de touristes (chez l’habitant ? Et surtout pas en béton !) Se mettent en place pour que les agences de voyage internationales puissent proposer ce site et dynamiser l’économie locale.
Merci pour cette belle découverte.
Merci a Jean Celestin pour son beau recit sur sa decouverte de Dalaba et a vous pour vos efforts de nous faire partager non seulement la beaute de la ville mais aussi la capacite de l’auteur en quelques lignes de nous donner l’envie de decouvrir l’histoire de Dalaba et de faire appel a la mobilisation pour la sauvegarde environnementale de cette perle de l’Afrique.
Merci a vous de la part d’un des fils de Thierno Oumar Diogo ‘ fondateur de la ville de Dalaba.