Responsable scientifique du Salon international du livre d’Alger (SILA), qui ouvre ses portes ce 25 octobre, et ce, jusqu’au 4 novembre 2023, pour la 26 édition. Professeur des Universités et Critique littéraire, il explique les enjeux de cette nouvelle page du SILA, parle de la programmation et analyse la situation des littératures africaines aujourd’hui dans le monde. Captivant !

Vous êtes Responsable scientifique du Salon international du livre d’Alger (SILA), dont la 26ᵉ édition aura lieu du 25 octobre au 4 novembre 2023 dans la capitale algérienne. Quelles sont les principales innovations de cette manifestation culturelle ?

 Le Salon International du Livre d’Alger (SILA) se tient tous les ans à la fin octobre et cette année, c’est en effet du 25 octobre au 4 novembre 2023. Il y a toujours un stand dédié à l’Afrique et à partir de cette édition ce stand sera dénommé « Espace Afrique ». C’est un lieu de rencontres et de débats avec des écrivains et des écrivaines de tout le continent africain. Cette année, cet espace revêt une importance particulière dans la mesure où l’Afrique est l’invitée d’honneur du SILA 2023. L’ensemble des activités culturelles du Salon auront à cœur d’aborder des thématiques en rapport avec l’Afrique, que ce soit sur les questions culturelles, géopolitiques, écologiques, économiques, littéraires, philosophiques, et cela, en rapport avec les stands, les éditeurs, les acteurs et actrices qui s’intéressent à l’Afrique. À l’espace Afrique, ce sont des débats autour des littératures africaines et du cinéma qui auront la priorité. Deux grandes personnalités littéraires sont les invitées d’honneur du SILA 2023, la romancière camerounaise Calixthe Beyala et le romancier guinéen Tierno Monenembo qui interviendront à l’Espace Afrique. En termes d’innovation, en accord avec le Commissaire du SILA, M. Mohamed Iguerb, nous favorisons un ou deux grands débats par jour à l’Espace Afrique afin d’aller au fond des problématiques abordées comme « la pensée africaine ou l’affirmation de soi au XXIᵉ siècle » ou encore la question essentielle qu’est l’engagement dans les littératures africaines dans le contexte actuel. Un hommage sera rendu à Nelson Mandela, 2023 étant le dixième anniversaire de sa disparition, ainsi qu’à Frantz Fanon à travers un excellent documentaire sur son héritage aujourd’hui, en débat avec son réalisateur Hassan Mezine. Un programme riche attend les visiteurs de ce Salon International du Livre d’Alger qui est le plus grand d’Afrique.

Vous le rappeliez, cette 26ᵉ page du SILA a pour thématique générique « Afrique : conscience et empreintes », qui annonce des échanges passionnants. Pourquoi cette thématique ?

« Afrique : conscience et empreintes » est le thème générique qui exprime avec force l’importance du continent africain en ce XXIᵉ comme on le voit aujourd’hui, une Afrique convoitée, mais qui veut prendre son destin en main, son empreinte est sa présence dans le monde même si l’Afrique parait pour beaucoup pauvre et mise à la marge de l’histoire, sa jeunesse, sa créativité, sa force sur le plan intellectuel est vérifiable de par sa productivité intellectuelle en Afrique et à travers la diaspora africaine dans le monde, y compris l’Afrique du Nord qui fait partie de l’Afrique et vouloir diviser l’Afrique en Afrique du Nord et Afrique Sub-saharienne est un non-sens historique et culturel. L’Afrique doit réunir toutes ses forces d’où qu’elles viennent, quelle que soit la région, pour pouvoir avancer grâce à son authenticité, à sa conscience, à son empreinte, dans un monde qui se veut de plus en plus uniformisé. L’Afrique fait la différence.

Vous êtes Professeur des Universités, Critique littéraire.  Quel regard portez-vous sur la littérature africaine aujourd’hui dans le contexte de la mondialisation et comment l’entrevoyez-vous à l’horizon 2030 ?

Je parlerai plutôt de littératures africaines, au pluriel et non au singulier, car depuis les années 1960, les littératures africaines ont évolué de manière exponentielle, dans le bon sens du terme. Et je pense que d’ici à 2030, les lettres africaines évolueront en diversité et en qualité. Vous savez, l’Afrique n’est pas un continent monolithique et donc il existe des littératures nationales, algériennes, camerounaises, guinéennes, sénégalaises, maliennes, sud-africaines, autant de pays que de littératures. Par ailleurs, force est de constater que les littératures écrites et publiées par des maisons d’édition africaines sont de plus en plus nombreuses dans de très nombreux pays, malgré la cherté du livre. Les livres édités en Afrique ne circulent malheureusement pas entre pays africains. Et ils ne sont pas visibles en Occident, ce qui est problématique pour de nombreux auteurs de qualité en termes de visibilité de leurs idées et de leurs talents. C’est pour cela que, pour beaucoup, les textes publiés à Paris ou à Londres deviennent les seules références pour les étudiants en lettres par exemple. J’espère que vers 2030, les politiques, ainsi que l’Union Africaine, apporteront des solutions pour la bonne circulation du livre entre États africains. À ce propos, à « l’Espace Afrique » au SILA, nous aurons un débat avec les professionnels sur la question de la circulation inter-africaine du livre, une réflexion sur le livre numérique qui peut être une des solutions pour la circulation rapide des textes.  Il y a la question des langues qui a beaucoup évolué. Les romanciers écrivent dans la langue qu’ils maitrisent le mieux sans que cela pose un problème et les publications dans les langues africaines augmentent. Il faudrait que vers 2030, il y ait plus de traductions de textes littéraires, et cela, dans toutes les langues africaines. En termes d’évolution et dans un monde globalisé, les littératures africaines mettent au cœur de leurs textes « l’humain ». L’être humain dans tous ses états est présent dans les textes africains, non seulement par ceux qui écrivent d’Afrique, mais aussi par les écrivains de la diaspora qui ont l’Afrique au cœur.

Recueilli par J.-C. Edjangué

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