Marocaine, membre de l’Association Rabat Accueil, très investie, dans l’entraide avec les sinistrés du séisme, début septembre 2023, au Maroc, Docteure en littératures comparées et françaises, écrivaine et chroniqueuse littéraire au Courrier de Genève, elle parle la solidarité nationale face au drame.

Comment la marocaine que vous êtes a-t-elle vécu le séisme qui vient de frapper une partie du royaume ?

On a ressenti la secousse à Rabat, la capitale du Maroc, vers 23 h 15. La terre qui tremble, par l’imprévisibilité de la chose, suscite toujours une grande frayeur, à la fois pour soi-même et pour les proches. Loin de l’épicentre, on tremble et le réflexe est de regrouper tout le monde et sortir de la maison. Là, on peut reprendre ses esprits et appeler les autres membres de la famille, éparpillés dans la ville, le reste du pays, dans le continent et à l’étranger, pour ce qui me concerne. On a vite compris que le séisme a touché plusieurs villes et régions. Mon village natal, M’zouda, se trouve dans la région d’Al Haouz, dans la province de Chichaoua, à proximité de l’épicentre, dans la zone où le séisme a fait énormément de dégâts. On déplore huit morts dans mon village où un instituteur et toute sa famille ont été décimés. Ma famille s’en est sortie et le reste du village a tenu, malgré des lézardes et traces dans les constructions. Les répliques, bien que de faible intensité, risquent de fragiliser les structures. Plusieurs habitations sont fissurées et les gens, redoutent l’effet des répliques qui continuent et préfèrent dormir à la belle étoile, si je puis dire. La solidarité nationale incarnée par Sa Majesté le Roi Mohamed VI et qui a immédiatement décrété trois jours de deuil national symbolise la cohésion et l’attention des pouvoirs publics pour les disparus, les survivants et les familles endeuillées.

Comment venir en aide aux sinistrés ?

La solidité des institutions est là et le déploiement des secours civils est soutenu par l’extraordinaire mobilisation et solidarité des Marocains et des Marocaines. Ce mouvement populaire est magnifique et impressionnant. Il s’agit d’une solidarité spontanée et immédiate. Tout le monde est mobilisé, les autorités, la société civile et les citoyens ordinaires. Dans mon quartier, à Rabat, il y a des points de récolte des dons en nature mis en place par les associations. Non seulement les habitants déposent des dons, mais participent au tri, à la recension, aux étiquetages des denrées alimentaires, vêtement, etc. L’association Rabat Accueil à laquelle je suis adhérente a tout de suite recensé les différents organismes et associations qui récoltent des dons, afin de les mettre à la disposition de ses adhérents qui veulent aider et savoir à qui confier leurs dons. Ce lien est précieux et important. Les associations de Parents d’élèves, dans l’école de ma fille, sont aussi mobilisées et organisent la collecte de dons dans les établissements scolaires, en faveur d’associations qui sont sur le terrain et qui les acheminent vers les zones sinistrées, comme l’association Baraka Angels, Zéro Berd ou Jood. Une chaîne de solidarité s’est ainsi mise en place spontanément et rapidement. Au village, malgré le traumatisme, les habitants sont actifs et l’entraide fonctionnent aussi pour secourir les familles les plus touchées et en particulier celles qui sont dans les montagnes environnantes. Mon frère a mis à la disposition des associations ses entrepôts pour le stockage et la redistribution des dons en nature. Les gros camions ne peuvent accéder à certains sites par les petites routes pour atteindre les villages dans les montagnes. Il faut donc charger les aides dans des véhicules qui peuvent emprunter ces chemins. Tout ceci requiert de la concertation, loin de l’affolement. Cette méthode sans tapage illustre l’impressionnante générosité, solidarité et responsabilisation de toute une nation derrière sa Majesté le Roi Mohamed VI.

Le Maroc a-t-il les moyens de relever le double défi de la reconstruction psychologique des citoyens et la reconstruction des zones détruites ?

Le Maroc a subi le tremblement de terre à Agadir et a une force collective qui autorise toutes les résiliences. Le pays a sans doute les moyens de reconstruire ce que la catastrophe a fracassé, mais pour l’heure, l’urgence est de secourir.

Recueilli en ligne par J.-C. Edjangué

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