La 51ᵉ édition de la fête nationale préoccupe des diasporas africaines qui vont marcher le 20 mai dans la capitale hexagonale.

« Paul Biya doit dégager ! » ; « Tshisékédi doit dégager ! » ; « Non à la guerre dans le Kivu ! Non à la guerre dans le NoSo ! » ; « Nous exigeons un dialogue inclusif entre Camerounais » ; « Nous exigeons que le Rwanda parte du RD Congo » ; « Nous voulons la libération de tous les prisonniers politiques dans toute l’Afrique » ; « Le 20 mai 2023 nous voulons dire aux despotes africains que la récréation est terminée » ; « Ingeta ! Ingeta ! Ingeta ! ».

L’élément vidéo posté en ligne se veut inédit avec, en filigrane, la volonté de mobiliser massivement les diasporas africaines d’Europe, pour faire une démonstration de force, le 20 mai 2023, à Paris. Comme si le thème de cette 51ᵉ fête de l’unité nationale « Forces de défense et peuple camerounais, en symbiose pour la sauvegarde de la paix et de l’unité nationale, socle d’un Cameroun fort et prospère », ne rassure guère une partie des diasporas camerounaises et africaines.

« De Château rouge… à l’Elysée »

Dans un message à la nation diffusée sur la toile le 7 mai dernier, Robert Waffo Wanto, celui qu’on appelle dans le milieu de la diaspora combattante « Le Général », président du Conseil des Camerounais de la Diaspora (CCD), annonçait déjà la couleur de la manifestation du 20 mai à Paris : « Depuis bientôt 7 ans, il n’a échappé à personne que la guerre civile dans les régions du Nord-Ouest Sud-Ouest (NoSo), a fini de sonner le glas de l’unité nationale savamment colmatée par feu le président Ahmadou Ahidjo, paix à son âme, celui dont les restes et ceux de son épouse reposent malheureusement toujours au Sénégal. Ces régions sont en proie à une guerre civile fratricide dont le lourd bilan s’élève à environ 15.000 morts et près d’1,5 million de déplacés intérieurs et extérieurs, ajouté à cela plusieurs centaines de prisonniers d’opinions. Le Cameroun est l’un des pays francophone au monde qui a le plus grand nombre de prisonniers politiques dont nous continuons à exiger la libération sans condition ». Indexant ensuite l’attitude des forces de l’ordre « impliquées dans la guerre contre leurs propres frères et sœurs dans le NoSo et dans les assassinats de journalistes, dont Martinez Zogo et Ola Bedé et même de religieux. Tout cela nous amène à exiger du président Paul Biya d’appeler en urgence, avant le 20 mai, à un dialogue national inclusif pour apaiser les cœurs, réconcilier les Camerounais et bâtir une paix définitive, la justice et l’État de droit au Cameroun », insiste Robert Waffo Wanto avant de conclure sous forme de mise en garde : « Faute de quoi, il est demandé au peuple camerounais de s’abstenir d’une quelconque célébration aussi bien à l’intérieur du triangle national qu’en diaspora, le 20 mai, date à laquelle nous organisons une grande marche panafricaine de Château Rouge à l’Élysée ».

« Un pays en pièces détachées »

Pour le journaliste et philosophe Cyrille Kemmegné, ancien rédacteur en Chef de CRTV, difficile de parler de fête de l’unité dès lors que l’état du territoire national suggère autre appréciation. « Le 20 mai, c’est la fête de l’unité au Cameroun. C’est une fête qui ne mérite pas d’être célébrée. Le Cameroun, aujourd’hui, est un pays en pièces détachées. Depuis bientôt une dizaine d’années, nos compatriotes anglophones continuent de réclamer à cor et à cri leur indépendance, le gouvernement et l’État du Cameroun ne font rien pour répondre à cette demande, encore moins pour apaiser le pays, réconcilier la nation. Pendant ce temps, les morts se ramassent à la pelle, des familles entières sont endeuillées. La guerre dans le NoSo enrichie ceux qui sont au pouvoir, c’est probablement la raison pour laquelle ils entretiennent cette crise ». Comment sortir de cette situation qui ressemble à s’y méprendre à une impasse ? « Je désespère de cette situation. En diaspora, nous nous préparons à organiser une grande manifestation à Paris, de boycott, contre la fête de l’unité célébrée le 20 mai. Cette manifestation sera panafricaine, parce que le cas du Cameroun n’est malheureusement pas isolé en Afrique », pense le journaliste.

51 ans après la première célébration, en 1972, la fête de l’unité nationale du Cameroun continue de faire couler beaucoup d’encre au sein de la diaspora camerounaise de France. 

Par Jean-Célestin Edjangué à Paris

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