Le titre, un brin provocateur, résume à merveille l’intrigue qui se joue entre deux cœurs aimants, Thomas, syndicaliste du mouvement étudiant « MRSIE »et Hilé, membre du bureau de la même organisation, qui ne se séparèrent momentanément que pour mieux se retrouver. L’ouvrage de 135 pages est paru chez l’Harmattan Côte d’Ivoire en 2023. À lire absolument.
« Ce roman raconte l’histoire d’un jeune étudiant, Charles Tomah, Secrétaire Général du mouvement syndicaliste « MRSIE », qui menait un combat syndical ardu contre le gouvernement pour l’amélioration des conditions de vie des étudiants. Tomah rencontre lors d’une tournée, Hilé, elle aussi membre du bureau de MRSIE. Hilé jeune fille rangée qui, malgré ses activités syndicales se préservait de toute relation amoureuse, tomba sous le charme de Tomah. Celui-ci ne fut d’ailleurs pas indifférent à la présence de cette jeune créature aussi ravissante qu’éloquente. L’idylle entre les deux jeunes dura jusqu’au jour où, voulant casser ce mouvement, le gouvernement octroie une bourse à Tomah afin de poursuivre ses études en France. Là-bas, il épousa la fille d’un industriel, brisant ainsi la vie de Hilé ». La quatrième de couverture de ce premier roman est un résumé fidèle du contenu des 135 pages de narration d’une histoire d’amour à rebondissement, qui laisse transparaître des thématiques aussi diverses que l’action syndicale, l’enthousiasme, la fougue et la détermination de la jeunesse, la question genre, le poids des traditions avec toujours en filigrane, les préoccupations environnementales.
« Un cœur qui balance »
Mais, c’est incontestablement l’histoire amoureuse entre Tomah et Hilé qui fait le charme et la profondeur du premier roman de l’auteure Zio Maka Madeleine. Une histoire qui aurait pu vaciller, mal finir, tant le Secrétaire Général du MRSIE, jeune loup aux dents incisives et bien longues, ne manquait ni de charisme, ni de compétences, encore moins de prétendantes. « Fatou venait ainsi de prendre possession des lieux. Elle s’engagea, devant sa belle-famille, de lui garder toujours ouverte la porte de leur maison et de contribuer à la restauration de l’unité familiale », note l’auteure, ajoutant plus loin : « Fatou caressait des rêves grandioses pour son mari : tu deviendras ministre un jour mon chéri et pourquoi pas président ? Tu en as les capacités et je t’y soutiendrai, prédisait-elle ». Fatou a effectivement su profiter de l’orage qui s’abattait sur l’union entre Tolmah et Hilé pour se faire une place au soleil qui irradiait, au début, la relation entre les deux jeunes syndicalistes. Elle, Fatou, s’est même investie corps et âme, pour que son mari de circonstance puisse atteindre les buts qu’elle avait imaginés et fixés pour leur couple. « Elle s’attardait sur les grandes actions du Président de la République en faveur des populations et attribuait volontiers les dons de son association, dont elle était le principal financier, à la magnanimité de celui-ci à l’égard de son peuple. Et en femme d’affaires avertie, elle accroissait ses comptes bancaires grâce à la vente des uniformes qu’elle imposait avec adresse à toutes ses cérémonies. Ces actions valurent la nomination de Charles à la tête du Ministère de l’Enseignement en remplacement de monsieur Pascal Déka appelé à d’autres fonctions. Fatou résolu alors de se charger de la formation politique de Charles ».
En réalité, le cœur de Charles balançait entre plusieurs jeunes filles. Lui, qui ne dédaignerait sûrement pas qu’on le prît pour le miroir de ces créatures fraîches, n’était jamais à court de prétexte, de mots, d’explications, pour justifier ses sorties avec les femmes, même quand il est pris la main dans le sac.
« Retour aux sources »
Il était écrit, dit, et finalement scellé que Hilé et Charles devaient nécessairement se retrouver, finir leurs jours ensemble. « Hilé trouva sa maison en fête. Comme le jour d’une naissance, sa mère avait badigeonné son corps de Kaolin et ceint un pagne en coton tissé autour de sa hanche, un autre soutenant ses seins flasques. Aucune musique ne jouait, mais elle dansait, aucun tam-tam ne résonnait, mais elle dansait ». Un amour qui se concrétisa par la naissance d’une magnifique petite fille. « Dans son berceau rose qui balançait doucement au gré de ses mouvements, bébé contemplait toutes ces couleurs qui l’entouraient, couleurs qui, pour lui, exprimaient la quiétude, la paix, la joie, la gaieté… Mais ses parents, Charles Tomah et Hilé, penchés sur sa crèche en pensant aux péripéties de leur vie, savaient qu’elle n’est pas toujours rose, qu’elle est faite de montagnes à escalader, de profondeurs à affronter, d’obstacles à contourner, d’embûches à négocier… eux qui l’appelaient indifféremment et avec affection Patience, Espérance, Persévérance ».
Quelle belle chute, pour un premier roman écrit dans un style simple, clair et finalement très captivant. Un coup d’essai, qui n’est vraiment loin d’être un coup de maîtresse.
À lire absolument !
Par Jean-Célestin Edjangué à Abidjan
*Colonel Zio Maka MadeleineL’Oiseau migrateur, chez l’Harmattan, 135 pages, 16 euros