Ils seront applicables dès le 1er janvier 2023, annonce un communiqué de l’Ambassade du Cameroun à Paris paru le 20 décembre.

« Il n’y a aucune raison de se réjouir d’une telle nouvelle. Bientôt, on ne pourra plus aller aussi souvent qu’on le voudrait rendre visite à sa famille au pays. C’est une véritable incongruité au moment où les mêmes autorités camerounaises veulent inciter la diaspora à investir toujours plus au pays natal ». Ce Camerounais d’origine, promoteur culturel, vivant sur la Côte d’Azur, en France, exprime le point de vue de nombre des membres du triangle national en exil dans l’hexagone.

Incompréhension

Pour eux, le communiqué du 20 décembre 2022, de l’Ambassade du Cameroun en France, destiné aux « Demandeurs de prestations consulaires » est au mieux une provocation, au pire inacceptable. Pourquoi ? Parce que le document signé pour l’Ambassadeur et par délégation de la main de M. Antoine Ahmadou, Ministre Conseiller, indique que « dans le cadre de l’uniformisation de la législation communautaire de la Zone CEMAC, la loi de Finances 2023 a introduit des dispositions nouvelles concernant les tarifs des droits de timbres de dimension et de certains timbres spécifiques ». Concrètement, les nouveaux tarifs « qui procèdent de la volonté de maintenir un bon niveau de qualité de service applicable dès le 1er janvier 2023 » sont : 172 euros pour visa normal des passeports étrangers ; 190 euros pour visa express et 10 euros un timbre gradué.

« Comme des vaches à lait »

« Une amie qui fait dans le Consulting, et qui a besoin d’aller trois à quatre fois par an au Cameroun, m’a confié que ça va être très compliqué dorénavant. Avec un visa ordinaire à 172 euros et express à 190 euros, elle ne voit pas comment elle pourra s’y prendre, ces nouveaux tarifs impactant son budget global », témoigne Emmanuel Simo, ingénieur électrotechnicien. Pour lui, « Ceux qui tiennent les rênes du pouvoir ont généralement fait des études en Europe. Ils ne veulent pas que la diaspora vienne souvent au pays, de peur probablement qu’ils perdent leur place. » Et si rien ne permet de dire qu’il y aurait une défiance, voire un mépris vis-à-vis de la diaspora, force est de constater que les exilés du triangle national ne sont pas loin d’être considérés comme des vaches à lait que l’on s’empresse de solliciter quand il faut investir dans des projets au pays ou venir en aide à la famille pour une raison ou une autre, et à laquelle on tourne le dos jusqu’à la prochaine traite. Sinon, comment expliquer que l’on ne tende pas assez l’oreille pour écouter attentivement les doléances, aspirations et rêves de cette diaspora ?

Nous avons l’art de donner le bâton pour nous faire taper dessus. La cacophonie que vient créer la nouvelle tarification des timbres pour les visas étrangers le confirme. Le communiqué y relatif semble avoir jeté un peu plus d’huile sur le feu au sein d’une communauté camerounaise qui essayait progressivement d’en finir avec la pomme de discorde pour véritablement être, pour une majorité de ces membres, à l’unisson et en synergie avec la mission de réconciliation assignée au Chef de la diplomatie camerounaise en France, SEM André-Magnus Ekoumou, par le président de la République Paul Biya.

Dans un ouvrage paru en 2019 chez l’Harmattan, au titre évocateur « Le Cameroun contre sa diaspora », Raoul Nkuitchou Nkouatchet attirait déjà l’attention sur deux choses clefs : « Premièrement, la diaspora est l’un des atouts déterminants du Cameroun dans la perspective de l’émergence. Deuxièmement, les élites de ce pays ne font aucun effort pour tirer bénéfice de cette ressource stratégique, parce qu’elles ont peur que sa contribution ne vienne ébranler l’ordre (politique, culturel et symbolique). » Triste réalité !

Par Jean-Célestin Edjangué à Paris

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