Ce Tchadien d’origine, pâtissier au restaurant le Jujube, dans le 18ᵉ arrondissement de Paris, sublime les produits du terroir sahélien et d’Afrique subsaharienne, pour le bonheur des papilles avides de douceurs exotiques en guise de dessert. Il sera présent au Salon Afrique Unie(SAU) dont l’acte 6 se tiendra à Cotonou, au Bénin, du 9 au 11 novembre.

Vous serez au Salon Afrique Unie(SAU) dont la 6ᵉ édition aura lieu du 9 au 11 novembre 2023, à Cotonou, au Bénin. Qu’attendez-vous de cet évènement ?

J’attends beaucoup sur la valorisation de nos produits, surtout sur la mise en lumière de nos talents. Il y a beaucoup de nos jeunes qui ont du talent, mais n’ont pas la chance d’être accompagnés par des mentors qui les portent, les sortent de la routine. J’en ai moi-même beaucoup souffert, de n’avoir pas pu bénéficier de cet accompagnement d’un grand chef français, un mentor qui m’encadre. J’apporterai aussi au SAU, à Cotonou, ce soutien de la valorisation des produits africains.

Comment devient-on pâtissier de renom en France quand on est d’origine tchadienne ?

C’est une très longue histoire. C’était très compliqué pour moi, au départ, maintenant ça va. Je viens d’une région au nord du Tchad, à Faya-Largeau. Nous sommes d’ethnie Goran. Et nous les Goran, nous avons des frontières que nous ne pouvons pas franchir, par exemple faire la cuisine pour un homme, c’est interdit. C’était donc très difficile au début, les cinq ou six premières années de ma carrière, mais à force de travail, ç’a fini par porter des fruits. Je me vois être accepté aujourd’hui. Je suis devenu un peu le chouchou de mon pays.

Depuis combien de temps avez-vous quitté le Tchad, votre pays de naissance, pour la France ?

J’ai quitté le Tchad en 2003. Mais je suis passé par l’Algérie, pour faire des études en Lettres modernes avec l’obtention d’une licence en 2007, avant d’arriver en France. Et je suis venu en France, j’ai changé complètement de filière et d’univers professionnel. Je me suis retrouvé seul, la passion de mon enfance est remontée à la surface, j’ai pesé le pour et le contre avant de trancher. J’ai choisi la cuisine. À mon arrivée sur le sol français, j’habitais à Montpellier dans l’Hérault, j’ai fait une école de cuisine. Je me suis vu vite plus pâtissier que cuisinier. J’ai donc contourné ma tendance naturelle, j’ai travaillé dans les grands restaurants puis j’ai fait une école de pâtisserie et je me suis spécialisé dans ce domaine, particulièrement dans les produits sahéliens.

Vous pouvez citer quelques produits du sahel que vous sublimez dans la pâtisserie ?

Venant de Faya-Largeau, au nord du Tchad, nous avons beaucoup de dattiers qui produisent des dattes. C’est un excellent substitut du sucre. J’utilise de ce fait beaucoup de dattes pour remplacer le sucre. Je travaille beaucoup sur le millet, le sorgho, les balanites, les gommes arabiques, la spiruline… la liste est trop longue, il y a beaucoup trop de produits. J’ai créé énormément de recettes à base de tous ces produits. Aujourd’hui, je suis un peu rare, seul aussi, parce qu’on a des pâtissiers, mais très peu de chefs pâtissiers spécialisés dans les produits des terroirs africains.

Aujourd’hui, vous avez créé votre propre marque. Comment ça s’est passé ?

J’ai déménagé de Paris pour aller en Afrique, pour ouvrir une école et transmettre ce que j’ai appris en France. Malheureusement, la situation politique et financière au Tchad n’est pas très stable. Mais j’ai pu faire un an là-bas et former 150 femmes, entre 2021 et aujourd’hui. J’avais l’ambition d’ouvrir mon propre restaurant, mais la Covid est passée par là. Actuellement, je collabore avec un chef talentueux, Monsieur David Senda Waguena, pour organiser des dîners à thèmes, à quatre mains. C’est vraiment un restaurant à visiter.

Recueilli à Paris par J.-C. Edjangué

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