Après Djerba, en Tunisie, en 2022, c’est la capitale du Cameroun, qui abritera les 3 et 4 novembre 2023, au Palais des Congrès, la 44ᵉ Conférence ministérielle de la Francophonie(CMF).

L’Ambassadeur du Cameroun en France, SEM André-Magnus Ekoumou, n’avait pas hésité à convier les Camerounais de la diaspora à prendre part, à la préparation de l’évènement, le 29 septembre dernier dans les locaux de la « Maison commune », rue d’Auteuil, dans le 16ᵉ arrondissement de Paris.

« Quel avenir pour la jeunesse francophone ? »

« Les 15-35 ans représentent un tiers de l’ensemble de locuteurs de l’espace francophone. Cette jeunesse, de mieux en mieux formés et de plus en plus tôt diplômés des universités et grandes écoles, reste peu associée aux processus de prises de décisions engageant le présent et le futur de la communauté francophone. Par ailleurs, ces jeunes générations sont victimes trois à quatre fois plus du chômage que la moyenne nationale des différents pays francophones. Comment les États peuvent-ils faire mieux et résoudre ces contradictions ? » Ces questionnements soulevés lors de réunion préparatoire de la 44ᵉ CFM entre l’Ambassadeur Ekoumou et la diaspora camerounaise, à Paris, fin septembre 2023, ont mis en lumière cette triste réalité. Des dizaines de Camerounais de la diaspora ont apporté leur contribution à la réussite de cette 44 CMF, même si certains n’étaient pas là. Tel fut le cas d’Eugène Ebodé, Administrateur de la Chaire des littératures et Arts Africains à l’Académie du Royaume du Maroc, qui, dans une note adressée à SEM l’Ambassadeur Ekoumou, a versé au débat plusieurs pistes de réflexions.

 « La bonne gouvernance »,

Commençant par clarifier la notion de « Bonne gouvernance », empruntée aux institutions financières, notamment à la Banque mondiale en 1989, le Professeur de littératures comparées lui trouve une belle armature et un désagrément : « l’ingérence extérieure (par l’économie et le pouvoir des institutions financières) et son corollaire : les attaque ou entorses à la souveraineté des États, principe indivisible en droit public interne comme international. Ce qui pose un problème, c’est le discours du « chasseur » », soutient-il. Et de marteler, pour ce qui est de cette première piste de réflexions : « Ce sont donc les biais et les mécanismes de l’ingérence qui font débat dans l’actualité publique africaine(…) L’universalité des principes est donc ici bafouée et la règle établie contestable et contestée ». On ne peut être plus clair.

« La francophonie, les langues africaines et la place de l’Afrique dans le multilatéralisme » 

Quant à son deuxième axe d’échange, Eugène Ebodé le consacre au « Multilatéralisme et la place de l’Afrique dans une ère multipolaire. Et là encore, il met les deux pieds dans le plat. « L’organisation de la francophonie a eu le mérite de voir le jour sous l’action des pères fondateurs africains et asiatiques. Au lendemain des indépendances, ils ont voulu donner un accent moins guerrier au séduisant propos de Kateb Yacine qui considérait le français comme « un butin de guerre ». Dans Le polygone étoilé (éd Seuil, 1966), l’écrivain algérien, par la voix de son père, appelait d’abord à la maîtrise de la langue du colon (pour rivaliser d’égal à égal sur son propre terrain) sans l’abandon de celle de ses pères ». Le Professeur Ebodé constate par ailleurs que : « Sur 54 pays africains, 48 États ont des langues officielles issues de deux anciennes puissances coloniales. Dans ce contexte, lier francophonie et « bonne gouvernance » pourrait apparaître comme une extension du domaine de l’ingérence via une langue. La langue est un outil de communication, mais pas une manière de gouvernement ». Il appelle donc, à la suite de Nghui Wa Thiong’o, invitant à « décoloniser les esprits » à soutenir aussi les langues africaines. D’autant plus que le berceau de l’humanité compte 50 % des langues du monde. Nul doute que ces réflexions et bien d’autres encore seront au cœur des échanges de cette 44ᵉ CMF, vendredi 3 et samedi 4 novembre 2023, au Palais des Congrès de Yaoundé, au Cameroun.

Par J. C. É à Yaoundé

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