L’artiste d’origine camerounaise présente sa production artistique sortie début septembre 2023. Un menu musical aux sonorités diverses et variées avec, en prime, des textes à sens.

Côté pile, une pochette à dominante noire avec le portrait d’un artiste en smoking noir, chemise blanche, bretelles et nœud papillon noirs, posant sa main gauche sur un piano et l’autre dans la poche de son pantalon. Le nom de l’auteur et le titre de l’album sont incrustés en lettres blanches. Côté face, la quatrième de couverture dévoile un peu plus le contenu.« « Longuè Lam », en traduction Ma vie, est la somme de toutes ses expériences musicales. Dix titres variés et assez entrainants qu’il a lui-même arrangés et produits par le label D.M Agency. Un délicieux métissage de sonorités du monde, Bosa Nova, High Life, Swing, Makossa, Assiko… Chantées en langue Douala et en français. Ces titres évoquent la magie de la vie avec ce qu’elle a de plus précieux ». Résumé d’un album musical à la fois entrainant, invitant au voyage et à la découverte, une production phonographique tendre, douce, cadencée, ambiancée avec la nécessité de se poser, de marquer un temps de réflexion, pour intérioriser la symphonie des instruments, la poétique et l’esthétique des mots, qui indexent les maux de nos sociétés, ceux qui rythment notre vie quotidienne.

10 titres variés, papillotants, renversants…

Pour sa première réalisation musicale en solo, le virtuose d’origine camerounaise, Deido Mbimbey, l’homme qui joue, de manière instantanée, deux pianos, comme dans High Life, il y a deux ans, nous sert une œuvre artistique qui se délecte comme un menu gastronomique concocté par un grand chef étoilé, qu’il est forcément dans cet album.

Lorsque nous nous sommes vus la dernière fois, Deido Mbimbey et moi, c’était le 21 juin 2023, à l’occasion de la dénomination de l’auditorium Manu Dibango du Conservatoire Olivier Messiaen, à Champigny-sur-Marne(94), pour célébrer un baobab africain de la musique mondiale. Il y avait là Ray Lema, Richard Epessè, Charly Nellè, Elimbi, Henri Njoh, des membres de la famille de Manu Dibango, mais aussi des personnalités politiques campinoises dont le Maire Laurent Jeanne, son adjoint à la Culture, Pierre Latronche, ou encore Caroline Adomo, d’origine camerounaise, Conseillère municipale de l’opposition…

Deido Mbimbey, ce musicien dont le génie n’est plus à vanter, m’a juste lancé dans le creux de l’oreille qu’il reviendra bientôt vers moi. Sans aucune autre précision. Il me contacte en août et m’envoie les éléments de communication de son tout premier album solo. Je rentre du Cameroun, où je suis allé accompagner à sa dernière demeure ma maman rappelée auprès des ancêtres. Je peux alors prendre le temps d’écouter, de déguster, un à un, chacun des dix morceaux préparés dans le menu musical par cet artiste qui se révèle à moi comme un chef. Prenez Itaba, le titre 1 de l’album Longue Lam, il apparaît comme la synthèse de la vie d’artiste de Deido Mbimbey depuis une quinzaine d’années. Le texte, chanté en français, duala et anglais, indexe « la jalousie et le favoritisme devenus le repas quotidien » autant que « la haine et les commérages », « le travail » des gens qui n’ont de cesse qu’à dénigrer les autres. Le destin, titre 2, prolonge ces thématiques, l’auteur-compositeur constatant qu’« Ils ne changeront pas », ces médisants. « Get out of my way ! », intime l’artiste.

Le poids des mots, l’harmonie des instruments

Le poids des mots se confronte à l’harmonie des instruments pour donner un tout coloré, ensoleillé, des sonorités renvoyant à une comptine racontée avec une voix posée accompagnée par des chœurs qui, pour une fois, apportent véritablement un plus au chant. L’artiste n’a pas oublié ses racines et Mon village (Bonébela) est un hommage touchant quartier Deido, tout comme Mama évoque avec pudeur et tendresse, celle qui lui a donné la vie alors que Mpon fustige le mensonge et son corollaire. Deux autres hommages, Njuke Bonene et Samson Aladin, convoquent Eko Roosevelt et Jean Bikoko Aladin, deux contributeurs inestimables à l’art musical du triangle national, de l’Afrique et de l’humanité. Quant au titre Itouédi, un makossa authentique qui ne sacrifie en rien les paroles à sens, il narre l’histoire d’une incompréhension entre la femme qu’il aimait, mais qui, sous l’emprise de sa famille, semblait mal apprécier la profession de l’artiste musicien. Ndol’a go est véritable hymne à l’amour, plus jazzy, traduisant l’envoûtement provoqué par les paroles mielleuses, au contraire de Ngonda dont le jazz est beaucoup plus pimenté, enlevé, avec des teintes de l’Assiko, autre clin d’œil à Aladin.

Pour un coup d’essai, Deido Mbimbey, auteur-compositeur, arrangeur, a réuni tous les ingrédients pour en faire un coup de chef ou de maître. Moi, j’ai adoré et depuis, chacune des sonorités de Longue Lam m’accompagne inlassablement. À écouter sans modération.

Par Jean-Célestin Edjangué à Paris

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